[MEMOIRE] 1er décembre 1944 – 1er décembre 2024 « 80 ans du massacre de Thiaroye » « La France voulait nous tuer parce que nous n’étions pas d’accord pour l’argent de notre captivité »

[MEMOIRE] 1er décembre 1944 – 1er décembre 2024 « 80 ans du massacre de Thiaroye » « La France voulait nous tuer parce que nous n’étions pas d’accord pour l’argent de notre captivité »

Durant l’été 1944, après le débarquement, des soldats africains se libèrent ou sont libérés, par les armées alliées, des Frontstalags (camps de prisonniers de l’Armée allemande situés principalement en France dans la zone occupée lors de la Seconde Guerre mondiale). L’armée les regroupe progressivement avec des soldats africains qui avaient participé aux combats de la Libération dans les rangs de l’armée de la France Libre, retirés du front, dans le cadre du « Blanchiment ».

Plusieurs milliers de soldats africains sont rassemblés dans des camps de transit sur le territoire métropolitain (Versailles, Granville, La Flèche, Rennes, Pontivy, Coëtquidan). La désorganisation est grande en France, et les pénuries sont nombreuses. L’administration et l’armée sont dans un désordre réel. Le sort des soldats des colonies n’est pas du tout traité comme une priorité par les autorités

A l’automne 1944, les autorités militaires françaises décident d’effectuer le rapatriement des troupes coloniales vers l’Afrique. Dans les camps de transit, la tension est considérable. A Versailles, étaient rassemblés à l’automne 1944, 1700 soldats coloniaux, soit environ 800 soldats nord-africains et 900 soldats africains avec d’autres troupes, françaises et américaines. Au camp militaire de Monshire, près de Liverpool, au Royaume-Uni, les actes d’indiscipline des tirailleurs cantonnés provisoirement en attendant leur rapatriement vers l’Afrique, furent nombreux durant les derniers jours d’octobre 1944 et les premiers jours de novembre.

Le 3 novembre 1944, au port de Morlaix, en Bretagne, 1950 soldats sont rassemblés pour embarquer sur le Circassia, le navire qui doit les ramener en Afrique de l’Ouest pour y être démobilisés. 315 d’entre eux refusent de monter sur le Circassia. Leur refus tient au non-paiement des sommes dues par les autorités militaires au titre des rappels de solde et des soldes de captivité. Ces tirailleurs n’acceptent pas de quitter le sol français sans le paiement complet de leurs droits.

Le 11 novembre, une opération armée est décidée par les autorités militaires à leur encontre au motif de leur indiscipline. Un tirailleur écrit à sa marraine de guerre : « On tire sur nous. Il y en a de grièvement blessés ou morts peut-être. Par conséquent, la France voulait nous tuer parce que nous n’étions pas d’accord pour l’argent de notre captivité. »

 L’opération du 11 novembre est menée par les gendarmes de la ville ; sept tirailleurs sont blessés par balles lors des affrontements.

« Lorsqu’on a voulu nous embarquer pour l’Afrique, nous avons refusé, nous voulions d’abord toucher nos arriérés de soldes, notre solde de captivité et les indemnités auxquelles nous avions droit. Nous voulions aussi changer nos marks allemands d’occupation. Les autorités françaises nous ont dit : « Bien sûr, vous avez droit à tout cela, mais votre situation sera réglée à Dakar. » Et comme notre confiance commençait à s’effriter, on fit appel à un officier américain du commandement pour nous convaincre. »

« Nous avions donc acquis une nouvelle mentalité, nous n’acceptions plus d’être traités en inférieurs. Nos galons sortaient du même magasin. Après avoir servi sous le même drapeau et accompli notre devoir de combattant, nous estimions que nous devions être traités de la même façon. En particulier, nos camarades français prisonniers de guerre comme nous, une fois libérés, avaient droit à un pécule. Nous l’avons demandé aussi. » Doudou Diallo

Le premier contingent des troupes d’Afrique de l’Ouest rapatrié après les combats de la Libération débarque à Dakar fin novembre 1944. Ces hommes doivent être démobilisés à Dakar puis regagner leurs régions d’origine en A.O.F. Leur arrivée à Dakar s’effectue le 21 novembre 1944, après seize jours de voyage depuis Morlaix, port breton, sur le navire britannique Circassia (un navire britannique puisque l’armée française à l’époque n’a plus de navires pour ses transports de troupes et dépend de ses alliés)

Source : Françoise Croset. Cahier pour une histoire du massacre de Thiaroye. 2017. hal-01598514v1

Fatoumata Bintou Sangaré

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