[80 ANS DEBARQUEMENT DE PROVENCE] J-17 : « Mesdames Tirailleurs » (3 sur 6)
Le rôle social et l’influence des femmes africaines a toujours été minimisé par les observateurs occidentaux. Elles seront présentées comme étant entièrement soumises à leurs pères et leurs maris, ne possédant aucune marge de manœuvre en dehors de celles des tâches quotidiennes. Les colonisateurs ne leur accorderont qu’une attention très secondaire
Pourtant, dans l’Afrique précoloniale, leurs conditions étaient tout autre. Elles exerçaient une autorité importante liée à l’imbrication de la famille et de l’état.
Cette autorité a été déconstruite par les colons qui ont mis en place une bureaucratie entièrement masculine et indépendante des liens personnels et familiaux
De nombreuses reines noires africaines ont précédé la colonisation :
- La reine Abla Pokou, mère du peuple Baoulé ivoirien
- La reine Nzinga de l’Angola, opposante face aux colons lors de la conquête coloniale en Afrique noire
- La princesse Gbokpoe edowoe dans le grand-popo à Djanglanmey (Ville côtière du sud-ouest du Bénin)
- Bien sûr la reine de Saba, reine de l’Éthiopie qui régna avant plusieurs royaumes de renoms d’Afrique noir
D’autres ont portés des empereurs sur le trône ; comme Nana Tourouba « Nana aux grosses tresses ».
Elle pénétra au cœur du royaume Sosso, chez le roi Sorcier, esclavagiste Soumaro Kanté. Son courage permettra à son frère Soundiata Keita et son armé de vaincre Soumaoro pour ensuite régner sur l’empire Mandingue et graver son histoire à travers les époques
Partout en Afrique, la mère du chef était un personnage important. La reine mère, une constante des pouvoirs anciens
Les femmes étaient ainsi au cœur du pouvoir
Bien sur tout ceci se passe loin des terres Egyptiennes !
Pour ceux qui résument l’histoire, la grandeur et les grandes figures de l’Afrique à celles de l’Egypte antique
Dans les colonies françaises, les familles des tirailleurs ont toujours vécu à côtés des forts et des camps.
Les femmes étaient d’anciennes esclaves et butins de guerres. Les premières années, elles sont considérées comme des parasites et soupçonnées de mettre en danger la santé et la sécurité des troupes. Le jugement de l’administration coloniale sera tout autre pendant la progression vers l’intérieur.
Les épouses, accompagnées de leurs enfants, permettaient aux tirailleurs de ne pas être pas dépaysés et de bénéficier de l’environnement familial. Elles deviendront des agents essentiels du recrutement, de la discipline et de la stabilité des troupes.
Elles participaient à la logistique et montaient parfois au front approvisionner les combattants en munitions et rechargeaient leurs armes. Elles étaient parfois tuées au combat. Plusieurs d’entre elles ont été citées à l’ordre du régiment ou même à l’ordre de l’Afrique occidentale (Sanction positive se matérialisant sous la forme de textes décrivant les comportements récompensés. Ces textes sont insérés dans des diplômes que reçoivent soit le soldat honoré, soit les familles dans le cas de citations posthumes)
Le général Mangin raconte l’action des femmes lors d’un combat : « ce jour-là, après la défection des conducteurs du convoi qui refusent d’approvisionner les combattants en munitions, les femmes s’en chargent malgré les dangers. Une femme est tuée, deux autres blessées ; toutes les trois sont citées à l’ordre des troupes de l’Afrique occidentale. »
- Instrumentalisation et utilisation des femmes :
« Ce qu’il y a de précieux chez le tirailleur, c’est sa femme » Capitaine Marceau
Pour le capitaine Marceau, les femmes ne rechignent pas au transport des charges et sont des ménagères économes, sachant préparer les repas, assurer le blanchiment, avec efficacité et en soulageant les hommes des tâches matérielles. Selon lui, ce système est plus rentable que les fourgons et l’intendance classiques. Elles ne se plaignent pas et sont aussi courageuses que leurs maris.
« Elles n’occasionnent pas de surcoût, vivant sur la ration de leur mari »
L’administration porta sur elles une attention particulière pour maitriser les troupes et cela à leurs dépens
Louis-Jules Obissier : « Il est arrivé que des gradés ont cru pouvoir s’oublier à rechercher les femmes de leurs tirailleurs, … abus honteux d’autorité et faute contre le devoir militaire aussi bien que contre le devoir moral »
Les officiers français, pour humilier puis montrer le statut de subalterne des tirailleurs infligeaient des punitions aux femmes de leurs soldats sans qu’ils ne puissent les protéger. La discipline est exercée par les officiers français sur les femmes des tirailleurs ; ce qui est une atteinte à leur autorité patriarcale, fondement de leur masculinité.
Les femmes de tirailleurs n’ont pas laissé de traces écrites et n’ont pas fait l’objet d’enquêtes orales.
Rares sont les textes et les images qu’on retrouve sur elles. Encore une fois, les femmes, effacées et oubliées dans l’histoire de l’humanité